Boris Vian et Serge Reggiani: Le déserteur

Boris Vian (1920-1959) a écrit cette chanson en 1954. On en a fait beaucoup de versions. Ici vous pouvez écouter celle de Serge Reggiani, qui commence, comme introduction, avec le célèbre poème écrit par Arthur Rimbaud à l'âge de seize ans: Le dormeur du val.
Il a été écrivain, chanteur, musicien de jazz, ingénieur, scénariste, acteur, peintre et traducteur.
Étudiant extraordinaire, il était le deuxième enfant d'une famille aisée qui aimait toutes les manifestations artistiques; sa mère jouait du piano et de l'harpe, et son père était traducteur d'anglais et d'allemand et écrivait de la poésie.
À Paris, il fréquentait les cafés de Saint-Germain-des Près (café de Flore, café des Deux Margots) et il y a rencontré des intellectuels comme Jean-Paul Sartre, Raymond, Queneau ou Simone de Beauvoir et des artistes comme Juliette Gréco, Miles Davis ou Marcel Mouloudji, qui ont influencé sa production artistique.
Il s'agit d'une chanson très connue internationalement et qui a été traduite à beaucoup de langues. Elle raconte l'histoire d'un homme qui est appelé pour partir à la guerre, qui écrit une lettre au président pour lui annoncer sa décision de déserter et il y encourage tout le monde à faire de la sorte. Voilà pourquoi elle a créé à l'époque une grande polémique et sa version originale a été interdite pendant la guerre d' Indochine.

Boris Vian (1920-1959) escribió esta canción en 1954. Desde entonces se han hecho muchas versiones de ella. Aquí podéis escuchar la de Serge Reggiani, que comienza, como introducción a la canción, con el famoso poema que Arthur Rimbaud escribió cuando tenía 16 años : Le dormeur du val.
Fue escritor, cantante, músico de jazz, ingeniero, guionista, actor, pintor y traductor. Fue un extraordinario estudiante. Era el segundo hijo de una familia acomodada y amante del arte; su madre tocaba el piano y el arpa, su padre era traductor de inglés y alemán y escribía poesía.
En París frecuentaba los cafés de Saint-Germain-des Près (café de Flore et café des Deux Margots) y allí conoció a intelectuales como Jean Paul- Sartre, Raymond, Queneau o Simone de Beauvoir et a artistas como Juliette Gréco, Miles Davis o Marcel Mouloudji, que han influenciado su producción artística.
Se trata de una canción conocida internacionalmente y traducida a muchos idiomas.
Cuenta la historia de un joven que es llamado a filas para ir a la guerra y que escribe una carta al presidente en la que le comunica su decisión de desertar al mismo tiempo que anima a la gente a que haga lo mismo. Por ello fue una canción muy polémica y la versión original fue censurada durante la guerra de Indochina.




Le dormeur du val.
Arthur Rimbaud (1854-1891)

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent; où le soleil, de la montagne fière,
Lui: c'est un petit val qui mousse des haillons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme:
Nature, berce-le chaudement: il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille.Il a deux trous rouges au côté droit.

Arthur Rimbaud (1870)

El durmiente del valle


Es un claro del bosque donde canta un río
Cuelgan alocadamente de las hierbas harapos
De plata; donde el sol de la altiva montaña
Luce: es un pequeño valle espumoso de luz.

Un soldado, joven, boquiabierto, cabeza desnuda
La nuca bañada en el frescor azul,
Duerme; está tumbado en la hierba, bajo el cielo,
Pálido en su verde lecho donde llueve la luz.

Los pies en los gladiolos, duerme. Sonriendo como
Sonreiría un niño enfermo, se echa un sueño:
Naturaleza, mécelo cálidamente: tiene frío.

Ya no le estremecen los perfumes;
Duerme en el sol, la mano sobre el pecho,
Tranquilo. Tiene dos agujeros rojos en el costado derecho.

Versión de Claire Deloupy



Le déserteur.
Boris Vian

Monsieur le président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps.

Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir.

Monsieur le président
Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens.

C'est pas pour vous fâcher,
Il faut que je vous dise,
Ma décision est prise,
Je m'en vais déserter.

Depuis que je suis né,
J'ai vu mourir mon père,
J'ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants.

Ma mère a tant souffert
Qu'elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers.

Quand j'étais prisonnier,
On m'a volé ma femme,
On m'a volé mon âme,
Et tout mon cher passé.

Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes,
J'irai sur les chemins.

Je mendierai ma vie
Sur les routes de France,
De Bretagne en Provence
Et je crierai aux gens:

"Refusez d'obéir,
Refusez de la faire,
N'allez pas à la guerre,
Refusez de partir."

S'il faut donner son sang,
Allez donner le vôtre,
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le président.

Si vous me poursuivez,
Prevenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer.

El desertor.
Boris Vian.

Señor presidente
Le escribo una carta
Que quizá lea
Si tiene tiempo.

Acabo de recibir
Los papeles militares
Para irme a la guerra
Antes del miércoles por la tarde.

Señor presidente
Yo no quiero hacerla
No estoy en la tierra
Para matar a pobre gente.

No es por enfadarle,
Tengo que decírselo a usted,
Mi decisión está tomada,
Voy a desertar

Desde que nací,
He visto morir a mi padre,
He visto a mis hermanos irse,
Y he visto llorar a mis hijos.

Mi madre sufrió tanto
Que está en la tumba
Y ya le dan igual las bombas
Y le dan igual los gusanos.

Cuando estaba prisionero,
Me quitaron a mi mujer,
Me quitaron el alma
y todo mi pasado querido

Mañana muy temprano
Le cerraré la puerta
en las narices a los años muertos.
Me iré por los caminos.

Iré mendigando
Por las rutas de Francia,
De Bretaña a Provenza
Y le gritaré a la gente:

"Negaros a obedecer,
Negaros a hacerla,
No vayáis a la guerra
Negaros a partir"

Si hay que dar la sangre,
Vaya usted a dar la suya,
Usted es buen apóstol,
Señor presidente.

Si me persigue usted,
Advierta a sus gendarmes
Que no llevaré armas
Y que podrán disparar.


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